USA #1: Oregon, the floor is lava
Après un mois passé en Oregon il est temps d'entamer notre lente migration. Nous sommes arrivés à Portland début octobre avec 135Kg de bagages, quelques économies et suffisamment de temps devant nous pour concrétiser un projet de voyage nous tenant à coeur depuis un moment déjà. En préambule du grand départ, nous posons nos valises chez Heidi, une amie de longue date de Caroline habitant l'Est de la ville. Nous y sommes restés le temps de gérer l'achat d'un véhicule et de régler les formalités administratives qui vont avec. De Portland, pas grand chose à dire. Dans le quartier d'Heidi on joue carte sur table: "Black lives matter", drapeau LGBTQIA+, "God bless America" ou "Fuck fentanyl dealers" entre autres pancartes plantées dans les jardins: On choisi ses amis mais on choisi pas ses voisins. Une rapide excursion en ville ne m'emballe pas particulièrement, nous n'y voyons ni l'extravagance d'une ville moderne ni le cachet d'une ville ancienne, seul les odeurs de weed parfumant les rues me sortent de mon apathie. La vie ici doit cependant être agréable, avec ce qu'il faut en culturel/sortie tout en ayant un accès rapide aux montagnes, visibles depuis les hauteurs de la ville.
Une dizaine de jours après notre arrivée, le moment tant attendu arrive enfin. Nous laissons dernière nous Portland et l'accueil chaleureux d'Heidi, de Rick et Jeven et prenons enfin la route au volant de notre "RV", acronyme de Recreational Vehicle. L'équivalent de nos "Camping Car", qui est un mot anglophone mais qui ne veut absolument rien dire en anglais. Equipé de son moteur Ford V10 Triton de 6,8L et 314ch, Hervé le bien nommé s'enfile avec aisance du 10 miles/gallon, soit un bon 24 l/100km. On est pas loin de confondre l'aiguille de la jauge à essence avec le compteur de vitesse. Nous roulons vers l'Est, de l'autre coté de la chaine de montagne de Cascade, pour découvrir notre première destination grimpe...
Trout Creek
Parmi les choses qui me poussent à voyager, vivre de nouvelles expériences est certainement la plus grande source de motivation. J'étais super curieux de découvrir ce site d'escalade présenté comme le plus beau spot d'escalade en fissure du Nord-Ouest. A Trout Creek, la nature a façonné sans fausse note des orgues volcaniques d'une exceptionnelle régularité et d'une raideur impressionnante. Je vous fais grâce du cours de physique sur l'explication de la forme hexagonale des orgues volcaniques, mais cette géométrie naturelle est incroyable.
La grimpe se pratique exclusivement en technique de fissure et en opposition, avec certaines sorties de voies plus classiques sur réglettes et trous. Les voies en opposition ("Stemming") sont extrêmement sollicitantes pour les jambes: Des mollets aux hanches la pression constante à exercer sur des voies de 20 à 30 mètres nous a donné de sacrées courbatures et de bonnes suées.
Avec les dix jours d'inactivités à digérer le décalage horaire combiné à une escalade déroutante et à des cotations reconnues par les locaux eux-même comme "un peu sèche", on a commencé notre séjour en se faisant bien rouster. La pratique et la forme revenant nous a ensuite apporté un peu de sensations, de relâchement et d'économie d'énergie mais cela reste une gestuelle très spécifique que l'on pratique assez peu chez nous et ca a été dur de monter dans les niveaux.
A Trout creek, l'environnement contribue également à rendre le lieux vraiment remarquable. La position dominante sur la rivière Deschutes, les plaines semi-arides et en arrière plan le volcan Mont Jefferson enneigé nous offre un panorama dont on ne se lasse pas. L'orientation Ouest de la falaise et ses couchers de soleil apporte une ambiance incroyable et les journées de grimpe s'étirent volontiers jusqu'à la tombée de la nuit.
Nous quittons finalement Trout Creek avec un peu de mauvais temps et beaucoup de courbatures en direction de notre deuxième destination de l'état de l'Oregon. Nous n'allons pas très loin, le "state park" de Smith Rock n'est qu'à une heure de route, un demi plein d'essence donc.
A Smith, changement de style, on oublie les fissures. Bon, pas tout à fait hein, on a bien trouvé de quoi bourrer quelques coinceurs par-ci par-là, mais ce n'est pas la spécialité locale. Smith est avant tout (re)connu pour être le site précurseur du développement de l'escalade sportive, comprenez équipée, aux Etats-unis. Honnêtement ca tombait très bien car Caro s'étant fait une légère entorse dans un verrou de pied, calmer les torsions de cheville semblait opportun: Vive les réglettes !
Les réglettes, les trous et les knobs, voilà la spécialité de Smith Rock, de la grimpe qui broute les doigts et use les chaussons, à moins que ca ne soit l'inverse. La roche volcanique, encore, n'a ici rien de compact ni de géométrique: c'est le bordel. Le pire et le meilleur se côtoient d'un secteur à l'autre, d'une strate à l'autre. A travers des dalles impressionnantes, les traces de magnésie dessinent des envolées prometteuses. Je dois l'avouer, j'ai joué le jeu à fond et j'ai adoré.
Le parc est très fréquenté, pour la beauté des paysages, la randonnée et bien sûr la grimpe. Le week-end on ne compte pas le nombre de groupes au pied des voies, de grimpeurs sur la falaise ou de binôme se baladant avec leurs "Stick clip". Car voilà une autre spécialité de Smith Rock: Le premier point à 5 mètres du sol et le deuxième 3 mètres après, pour un bon coup de pression au démarrage.
J'ai adoré l'escalade, l'ambiance et les paysages que ces deux spots de grimpe nous ont permis de découvrir. On termine ce premier chapitre avec les doigts usés, agréablement surpris de notre passage en Oregon. Cap au sud maintenant, une longue route nous attend.















