Pilier Rhodo: Roustes en série

 Un petit coup de plâtre sur les aiguilles de Cham nous contraint à trouver un plan B pour 3 jours de dispo avec Caro. Dans la liste des trucs à découvrir on opte pour "Le pilier Rhodo" dans la Val d'Aoste. C'est encore une fois à la lecture d'un article de Jeff Mercier que je découvre ce spot de Trad italien. Pas de photo, une description qui sent bon la rouste et un lien vers le blog de Matteo Giglio.

En découverant ce spot, je me suis dit que le ticket d'entrée ne faisait pas vraiment rigoler et que la falaise n'avait pas vraiment de gueule. Une Dacia Logy, un élan d'optimisme réciproque mêlé à un excès de confiance nous conduit donc à Montjovet, 3h30 depuis Chambé par le Piccolo San Bernardo. 

Du bas, pas de surprise, ça n'a pas de gueule. Un village italien coincé entre la route, l'autoroute et la voie ferrée; de l'autre coté de la Dora Balté, un éperon en rocher à l'aspect douteux et haut perché: Notre spot.

Le village de Bourg, près de Montjovet

Les indications d'accès du blog de Matteo sont précises, à la ruine la sente est vraiment peu marquée et dans les châtaigniers donc masquée par les feuilles. Une fois les premiers cairns repérés, c'est évident.

L'arrivée au pied de la falaise apporte un peu de baume au coeur. Quelques belles fissures mettent l'eau à la bouche, mais les perspectives sont étranges. Nous commençons notre demi journée avec "Clean Spit", la voie la plus à gauche de la falaise et qui nous semble la plus accessible.

Au pied du pilier Rhodo

Clean Spit, la rouste d'entrée

Caro s'équipe pour L1, après 10 minutes sans décoller les pieds du sol, elle me cède la politesse pour un premier pas en 6b+ qui en dira long sur les crux de la falaise: c'est typé bloc !! Ensuite, c'est floue, j'hésite où continuer. Après bien des hésitations je me fraye un passage sur la gauche et continue dans un terrain difficilement protegeable. Cinq minutes le nez sur le topo et il faut se rendre à l'évidence: j'ai fais n'importe quoi. Désescalade scabreuse, retour 10m au dessus du sol et... relai. J'étais passé 1 mètre à gauche sans le voir et j'étais sur des perspectives totalement fausses du topo et des tracés. En fait les longueurs sont toutes très courtes, le topo très détaillé !

L1 - Le relai est au strict opposé à droite

L2 est donnée morpho en 6c+, je me lance dans une traversée entre deux toit. Technique table basse totalement inconfortable, deux plaquettes plus que bienvenue et impossibilité totale de sortir de cette mauvaise position pour attraper le bac salvateur de sortie. A0 sur le deuxième clou. Je pensais en avoir terminé, ayant bien compris que morpho voulait dire pour personne d'1,20m mais c'était sans compter un entêtement borné pour me rétablir avec la mauvaise méthode. 45' pendu dans le baudrier et 10 essais plus tard, Caro nous sort de se mauvais pas en abordant les choses différemment et nous sauve du but. ouf.

L2 - Technique table basse
Anti-méthode

L3, 6b, beau dièdre et traversée sous un toit. En un rappel de 50 mètres nous somme en bas de la voie, nous avons mis 4h30...

Clean Spit L3

Clean Spit, L3

Wonder Crack, la rouste aussi

J2, on est pas calmé et on aime ça, on va défourailler Wonder Crack et ca va pas trainer ! La ligne est très esthétique et en plein milieu de la parois, dans la zone de roche lisse.

L1 est donnée 5b... Hum Hum.

L2, 6c+, les choses sérieuses commencent et s'arrête très rapidement avec un vol qui me ramène vraiment très proche de Caro et de la vire d'assurage. Après quelques essais dans la fissure de droite dans laquelle je n'arrive pas à placer mes pieds, je jette mon dévolu sur la fissure de gauche avec le même manque de réussite. Quelques verrous, une théorie de coincement qui paraît envisageable mais toujours rien pour placer les pieds. Je fini par trouver le pied providentiel, celui d'une pédale sur un friend me permettant de passer le crux. La suite est belle mais la longueur à le goût de l'échec.

L2, crux

Wonder crack, fin de L2

L3, 6b+, Caro s'envole dans de beaux mouvements avec ce qui faut là où il faut et une sortie un peu runout. Un sec tout de même, faut pas déconner on à une ligne directrice à respecter ! J'enchaine en second, feignant de ne pas trop en chier pour me persuader que j'ai de la marge pour la longueur d'après.

Wonder crack L3

L4, 7a, je la sens pas. Du bas ça met les pétoches ! Deux passages de surplomb, protections mystères. Cette fois à défaut d'être enchaînés, les mouvements sont au moins réalisés. Je me réconforte comme je peux !

L5, 6b+, Je dois faire de la peine à Caro car elle me laisse la longueur, que j'arrive à cocher avec un peu de doute sur la sortie, il n'y a pas une longueur qui se laisse faire !!

L5

A la descente, et toujours dans un élan de bonté, j'ai le droit de m'offrir un peu de jamming facile dans "Poliferno" 6a+, une fissure d'une longueur en ascendance gauche. A vaincre sans périls, on triomphe un peu quand même.

Poliferno, fin de la traversée

Malgré notre lenteur il nous reste un peu de temps, alors pourquoi pas retenter notre chance dans une autre voie ?

Fessura @dondolo, un peu d'espoir ?

Un peu de largeur en perspective, on se lance avec un peu d'humilité et d'appréhension vu nos performances du moment. 

L1: Caro nous conduit au pied de la fessura. 5c, rien à signaler et ça fait du bien.

L2: 6c, Un peu de renfougne, quelques beaux coincements et une voie enchainée. Champagne !

Smemoranda, la rouste finale

J3, on est plus très frais mais on y croit ! L'idée serai de faire les 2 premières longueurs de Smemoranda (6c+;6a) puis d'aller voir "Récupéro zero" à partir de L2 (6b+; 7a+,6a). Et oui: "Les cons, ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnait"

L1 est magnifique et grandiose. 6c+ en détente, 2 spit en traversée sur réglettes avec un mouvement funky pour se lancer, puis traversée sous le grand toit avec des mouvements amples au début pour trouver les bacs puis une fissure en inverse sous le toit les pieds sur les réglettes, sortie en dièdre fissure à main. protections deux violets, deux rouges. Majeur ! La théorie ne remplace pas la pratique, dans la réalité, c'est un vol sur le deuxième point étant trop daubé pour mettre le friend salvateur, puis un sec au premier et au deuxième friend. Il n'y a que la fin que j'arrive à enchainer.

Smemoranda, L1

J'ai les avant bras daubés, je me trompe de taille de friend, je place mal mes pieds... c'est la cata !

Caro me convainc de laisser les protec et de la faire en tête mais non clean. L'idée me rebute mais je dois accepter ma médiocrité et faire les choses à mon niveau, pour progresser.

Deuxième essaie, ça passe pas trop mal. Il y a de la marge finalement... Ahah

Du coup la suite nous paraît compromis et on descend faire L1 (6a) + L2 (6b+) de "Récupéro zéro" qui semble plus réaliste. Une première longueur en dièdre/cheminée suivie d'un dièdre fissurée plus retord qui n'en à l'air du bas (j'aurai pu m'en douter !!). Deux longueurs chouettes malgré un aspect peu engageant vue du bas. 14h, le compte est bon, on a notre quota de fessées pour le week-end.

Récupéro zéro, L1 6a

Récupéro zero, L2, 6b+

Malgré tout, et peu être grâce à ces déculottées en série, c'était un super week-end de découverte du Pilier Rhodo. C'est un site surprenant à bien des égards. Les lignes sont belles, l'escalade exigeante, la roche un peu déstabilisante. Je pense qu'il faut un sacré niveau pour enchainer ces voies à vue. Pour moi elles demanderont un peu ou beaucoup de travail, que je serai content de pouvoir entreprendre lors d'une prochaine visite. Wonder Crack mérite l'enchainement clean.

Au niveau du matos, je confirme qu'il est bon d'avoir quelques micro friends en plus du matériel standard de trad, les stoppers ne suffisent pas car certaines micro fissures sont très parallèles. Et comme vous avez pu le lire ici et ailleurs, je confirme qu'il faut venir avec un peu d'humilité et beaucoup de ténacité !